Alors comme ça tu veux diffuser une chanson sur Internet ?
Peu importe que tu souhaites gagner de l’argent ou non.
Qui dit Internet, dit public
Qui dit public, dit droit d’auteur
Qui dit droit d’auteur, dit autorisation
Pour faire simple , une “oeuvre musicale” se caractérise généralement par 3 éléments :
1 musique (la mélodie principale, son rythme, ses accords et les arrangements)
1 texte
1 interprète
Si tu as créé tout seul une oeuvre originale complète : bravo, tu touches le jackpot de la fameuse trilogie : auteur / compositeur / interprète
Si tu es Patrick Hernandez, bravo tu touches (selon la légende) 1 000€ par jour toute ta vie d’artiste pour “Born to be alive” soit (2021 - 1979) * 365 * 1000€ ...en moyenne... Et ses héritiers toucheront ces droits 70 ans après sa mort, ce que personne d'autre ne souhaite.
Par contre si tu utilises une chanson “connue” et déjà exploitée commercialement (à titre gratuit ou payant - peu importe) et si tu modifies l’un des 3 éléments, tu crées une nouvelle oeuvre, quelque soit le support et quelque soit la destination (partition, séquence MIDI, cover, SoundCloud, Youtube etc.)
Si tu créé un remix de "Born to be alive" à la gimbarde limousine d'Aixe-Sur-Vienne, tu ne touches pas les droits de Monsieur Hernandez à sa place... C'est lui le propriétaire de la musique et des paroles. Tu créé un "cover" et si tu veux gagner de l'argent avec, tu dois lui demander l'autorisation et lui reverser sa part (50% au bas mot s'il accepte).
La musique est associée au droit du compositeur.
Le texte au droit du parolier et bien entendu, l’interprétation à l’interprète.
A noter pour corser le tout, que chaque élément peut être détenu par une seule ou plusieurs personnes. C’est autant d’autorisation à demander en cas d’exploitation publique / commerciale.
Bien entendu, tout ce que tu fais chez toi reste chez toi : ce que l’on appelle le “cercle privé”. Si tu siffles "Born to be alive" dans ta cuisine (même dans la rue) tu ne dois rien à personne.
Si l’un des éléments est tombé dans le domaine public, tout est libre d'utilisation. Cela signifie que tu peux le produire et le vendre si tu en es l'interprète musical et/ou instrumental.
Attention : une oeuvre de Wagner, Mozart, Lully, Brahms (car mort depuis plus de 70 ans) est libre de droit, mais pas son interprétation par un orchestre moderne bulgare ou un soliste péruvien à la flûte de pan. Ce qui signifie que l'interprétation d'une chanson du domaine public ne t'appartient pas... Et je sais de quoi je parle .... J'en ai fait les frais.
Détaillons chaque élément :
1/ La musique
La mélodie : Un air, une chanson, un tube, un morceau est caractérisé par sa mélodie principale. C'est l'empreinte du morceau et c'est d'ailleurs comme cela que les robots qui gèrent les droits d'auteur reconnaissent ou non un titre et l'associe aux droits d'auteur.
Les arrangements, le style et les sons : ils peuvent faire ou défaire un morceau, le rendre totalement unique. Mais leur simple ré-interprétation n'est pas suffisante pour dénoncer un plagiat. Il faudrait pour cela copier une partie complète instrumentale : c'est le "sampling".
Si tu joues une chanson, à savoir la mélodie et/ou les accords, (tu as tout à fait le droit de la siffler et de t’accompagner), cette interprétation est la tienne. Tu as donc un droit d’interprétation car on estime que ta version est tout simplement différente de la version originale, et que tu apportes ta “personnalité”, ta façon de jouer.
A partir du moment une diffusion publique et l'argent entrent en jeu, le compositeur ou tout autre représentant légal peut demander une rétribution ou simplement te refuser le droit de l’interpréter sur le net et ailleurs sur Terre et dans tout l'univers publiquement.
Cela se passe sans trop de problèmes sur Youtube par exemple, dans la mesure où tu “apportes” quelque chose, que tu ne fais pas une copie à l’identique, et que tu partages / offre les revenus générés par ta prestation. Attention cela n'est pas systématique.
Il est très difficile de jouer une musique rigoureusement similaire à la version originale. En effet plusieurs sous éléments sont utilisés lors de l’enregistrement initial de la bande son : les musiciens, les instruments, leurs interprétation, le mixage, l’ingénieur du son, le studio, la mélodie et les arrangements.
Si dans ce domaine la tolérance est grande, il y a interprétation et interprétation.
En effet : jouer un titre du groupe Supertramp à la guitare peut être considéré comme personnel, mais si tu le reprends au piano et à fortiori au piano électrique (rien que le son est identifié au groupe et inversement), tu vas te rapprocher tellement de l’œuvre originale que tu seras accusé de copie et non d’interprétation (merci Roger Hodgson). On pourrait même se demander si jouer sur un piano Fender est autorisé.
Par contre, si tu fais et tu vends toi même ta suite d'accords Am / D / Bm7 / E7 avec un certain rythme (ou un rythme certain) sur lesquels on pourrait par hasard chanter un certain titre d'un duo français dont le prénom est Rita, et bien il sera extrêment difficile de crier au plagiat sur cette suite d'accords avec un style très différent. Tu peux écouter d'ailleurs ce que nous proposons dans ce registre particulier en visitant notre site BANDCAMP et cette version instrumentale ou tu pourrais chanter une chanson avec le mot "grenade" par exemple...
2/ Les paroles : attention danger !!!
Il ne peut exister d’interprétation des paroles : un mot est un mot, un texte est un texte. Il s'agit donc une copie systématique, donc demande d'autorisation préalable, donc la galère, donc bye bye les karaokés faciles à partir de séquences MIDI ou des covers où les paroles apparaissent clairement à l’écran.
SI tu n’as aucune autorisation du parolier ou de son représentant, Youtube ferme ta chaîne, que la monétisation soit activée ou non, ta page est supprimée, ton site fermé.
Restent les textes du domaine public… La Marseillaise ?
Mieux encore : écrire.
3/ L’interprétation
L’interprète, qu’il chante ou joue le morceau, donne vie et une existence publique à l’oeuvre musicale. Utiliser l’interprète original est impossible, ou cela s’appelle de la diffusion d’une oeuvre complète sans autorisation. Clairement ? Du piratage.
Mieux vaut passer son temps à composer.
Laurent WALKER-HAVETTE